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GATABASE
Qu’est-ce qu’on va faire de toi ?

Tu es fou.

C’est sans doute vrai car ce n’est pas toi qui le dit.

« Tu es fou, » t’ont expliqué les personnes qui ne sont pas toi.
Mais toi tu dirais autrement.

Toi tu n’est pas fou mais habité. Oui c’est cela, tu es habité.
Habité par la forme de toutes les choses
qui ressemblent au bonheur. Mais ce n’est pas le bonheur.
On y croirait.

Qu’est-ce qu’on va faire de toi ?

Tu as mis le feu à ton sang.
Qu’est-ce qu’on va faire de tes cendres ?

Ton chemin s’est brisé et tes idoles sont toutes mortes. Tu attends le danger à n’importe quelle
heure, tu cherches l’occasion d’introduire dans ton système d’étranges substances parasitaires,
tu cherches la merde dans le regard des gens. Et tu vas la trouver. C’est dans ta nature.

Qu’est-ce qu’on va faire de toi ?
Tu ne crois en rien, à commencer par toi-même.
Tu ne sais pas où déplacer ta personne, tu as l’âme en état de siège.

Rien ne semble pouvoir te détourner d’elle - cette pensée que tu as manqué de peu ton rôle,
le rôle du héros.

Tu n’as renoncé ni à la vie, ni à la violence qui la caractérise. Elle s’obstine en toi comme
une incantation.

Cours après ton bonheur, cours après ta queue. Tu n’es qu’un chien qui erre
en fantasmant son maitre.

Qu’est-ce qu’on va faire de toi ?

Innocent et perdu, tu erres à la recherche de ton paradis.
Tu ne sais pas au’il est artificiel.
Tu portes en toi le goût de l’anéantissement, tu regardes les gens
et les vies et les choses : rien n’est plus triste que toi.

Brisé comme le sont les enfants dans des corps adultes, tu es victime de tous les dogmes
du monde. Des traumatismes que tu fais passer pour des habitudes.
Toi, tu grandiras tordu.

Tu souris. Tu ne sembles pas au courant de ta propre tragédie.

Pourtant et à présent tout semble relever du drame. Autour de toi, les corps en chantier,
les décombres de ce qui a été leur fête. Les stroboscopes brisés et les cristaux séchés dans les
verres.
L’antichambre détruite. Et, au-delà, le dancefloor.

Tu mourras pour la fête, toi. La tienne et aussi celles des autres, à laquelle tu t’invites
avec une telle certitude. Toi on ne peut pas te dire non.

Non, tu ne le prendras pas pour réponse.

Toi qui refuse la vie et préfère les tombes, préfère les ombres, tu es venu faire la fête,
comme à ton habitude. Faire la fête sur les toits et dans les nuits des hangars. Tomber du perchoir.
Te réveiller dans une piscine.

Pousser ton cri, chercher le soleil.

Voilà ce que tu es. Un soleil englouti par un cri au fond d’une piscine.

Un bébé nageur.